Bons baisers de « Baraki »

Rencontre avec l’équipe de la série Baraki, au mitan de la 9e semaine de tournage…

« Coupez! » Le clap de fin résonne encore au loin quand nous rejoignons l’équipe de Baraki, provisoirement installée au Cimetière d’Uccle, après 9 semaines de tournage en Wallonie et dans les environs de Bruxelles. Malgré la légitime fatigue, producteur, auteur, réalisateur et comédien principal ne manquent pas d’enthousiasme quand il s’agit de nous entraîner dans l’univers vivant et surprenant de Baraki, nouvelle série issue du fonds RTBF/ FWB, et première dramédie dans un format inédit de 26mn.

C’est bien un voyage que se voit proposer le spectateur, au coeur d’un territoire narratif lui aussi plutôt inédit. L’idée derrière leurs têtes? Redonner ses lettres de noblesse à la figure du baraki en lui ouvrant les portes de la fiction, lui qui est si souvent cantonné aux reportages sur le tuning. Les auteurs comptent bien dynamiter les clichés, s’en jouer avec malice, et même, faire preuve de nuance là où ne l’attendait pas forcément.

Restrictions Covid obligent, on rencontre l’équipe hors plateau, dont on essaye donc de sentir l’ambiance à distance. Les mines fatiguées mais l’enthousiasme communicateur finissent de nous convaincre que l’ambiance est un doux mélange entre sérieux, efficacité et fantaisie.

Tournage-Baraki

Une histoire de mots…

Mais revenons au commencement: c’est quoi, en fait, un baraki?

« Nos barakis, ce sont des personnages libres, hyper expressifs, et hyper touchants, qui osent adopter des solutions farfelues face aux problèmes qu’ils rencontrent », nous explique Julien Vargas, auteur et co-créateur de la série aux côtés de Peter Ninane. Pierre, Nisse, qui incarne Didier, l’un des rôles principaux, confirme: « Etre baraki, c’est un état d’esprit. on peut tous être un baraki. C’est quelque chose d’un peu unique, instinctif, sincère. C’est très beau, en fait. »

Pierre-Nisse-Cinevox
Pierre Nisse, qui interprète le rôle de Didier

« Finalement, c’est un mot qui fait un peu peur, que certains prennent comme une insulte, explique David Mathy, le producteur. Pour nous baraki, c’est un mot plein de tendresse, c’est comme ça qu’on appelle notre meilleur ami quand il fait une connerie. » Il y a plein de façon, de prononcer un mot, et la charge qu’on y met peut faire varier son sens du tout au tout…

« Historiquement, renchérit le producteur, les barakis, ce sont les immigrés italiens qui sont venus travailler dans les mines, pour faire la prospérité de la Belgique, et qu’on a logés dans des baraquements. »

La Baraki, territoire de fiction

« La réalité de la Belgique post-industrielle, continue David Mathy, ce sont aussi ces réalités socio-économiques là, qu’on ne voulait pas éviter, on voulait porter sur elles un regard différent. S’extraire d’un regard souvent bourgeois et un peu caricatural sur ces populations. » C’était d’ailleurs l’une des interrogations de Pierre Nisse quand on lui a proposé le rôle. Il fallait bien sûr que son regard coïncide avec celui des auteurs, « et leur position m’a vite rassuré. L’idée ici n’est pas de rigoler de, mais bien d’être avec, loin de toute condescendance. »

Il faut dire aussi qu’une grande partie de l’équipe revendique fièrement ses origines baraki. « On se sent à l’aise, parce que c’est un univers qu’on connait, confie Fred de Loof, le réalisateur principal du projet. Mes parents n’arrêtent pas de me dire que je m’inspire d’eux pour faire mes films, et ici c’est à nouveau le cas. On se nourrit de vraies anecdotes. D’ailleurs dans le pilote de la série, il y avait une scène où Didier et Ivan font du canoë dans une piscine hors-sol. Et l’autre jour, mon père m’envoie des photos d’une « piscine » qu’il a fabriquée avec un pote, faite de caisses et de ballots de paille! »

Julien-Vargas-Cinevox
Julien Vargas, comédien, co-créateur et auteur de la série

Le récit est fortement ancré dans un territoire, profondément belge. « Qu’il s’agisse de Julien, Peter, Fred de Loof, ou moi-même, nous dit David Mathy, on n’est pas de la Capitale! On vient de là, de Baraki, cette République que personne ne connait mais qui existe. Ces personnages, ce sont les personnages de notre enfance, on les connaît, c’est le monde doux et tendre dans lequel on a vécu. »

« On avait profondément envie de faire vivre les personnages de notre enfance, et de les voir à l’écran, et qui plus est dans une comédie, conclut Julien Vargas. Comme dans La Part des Anges de Ken Loach, qui était l’un de nos références. C’est horrible ce qui arrive aux personnages, ils sont dans la merde, mais on se marre avec eux. Pour nous, c’est aussi une série feel-good, qui donne envie au spectateur d’aller habiter dans cette maison. » 

Retour sur un format inédit: la dramédie 26mn

Baraki, ce sont 20 épisodes de 26mn, soit un format tout nouveau dans la famille des séries issues du Fonds RTBF/FWB. Un format d’épisodes « courts » qui permet d’aborder un nouveau genre, celui de la dramédie. Le producteur, David Mathy, confirme: « Quand les créateurs de la série, Julien Vargas et Peter Ninane sont venus me voir, ils avaient en tête un projet de webserie. Mais en voyant l’étendu de la matière, je leur ai dit qu’en fait, c’était bien une série qu’ils avaient là! Il y avait déjà eu des sitcoms en format 26 minutes, mais nous on visait autre chose, s’inspirant des dramédies anglo-saxonnes. »

D’autant que Baraki est essentiellement tourné en décors naturels, on est loin du studio unique des sitcoms. David Mathy renchérit: « Effectivement, on a un format de sitcom, une économie de sitcom, mais c’est bien une série dans l’écriture et les ambitions artistiques! On voulait prendre le pari que font les anglo-saxons. On nous a vite dit qu’il fallait rationnaliser les décors… mais on n’a pas vraiment écouté! »

Fred de Loof d’ailleurs s’enthousiasme sur la direction artistique de la série: « L’idée était de rester loin de tout misérabilisme, ce sont des personnages hauts en couleur, et le stylisme et les décors sont à l’avenant. »

Fred-De-Loof-Cinevox
Fred de Loof, réalisateur

A la réalisation, on retrouve effectivement quatre jeunes talents prometteurs du cinéma belge (et luxembourgeois!): Fred de Loof donc, Adriana Da Fonseca (Capote percée, La Ressource humaine), Addy El Assal (Sawah) et Bérangère Mac Neese (Matriochkas). C’est Fred de Loof, réalisateur principal, qui encadre si l’on peut dire l’équipe, en ayant imaginer quelques codes narratifs et visuels dont sont invité·es à s’emparer ses coréalisateur·rices. Il nous explique en quoi la formation de cette équipe contribue au dynamisme de la série:

« D’abord, cela permet de garder un regard vif et spontané. Pour la comédie en particulier, il faut être en forme sur le plateau, être alerte, et pouvoir rebondir facilement. Alors quand on a un tournage de 4 mois, c’est précieux de pouvoir se relayer dans cette position. Pour veiller à l’homogénéité des 20 épisodes, j’ai dicté quelques codes, pour que les autres poussent jouer avec, tout en gardant leur écriture.

Moi j’affectionne particulièrement la comédie, et même verser dans l’absurde. Bérangère Mac Neese, qui vient d’achever sa séquence, est très proche des comédiens, elle a sublimé ses épisodes, les emmenant plus loin qu’on ne pouvait l’imaginer, notamment en traitant les sujets de la grosses ou de l’homosexualité, qu’elles avaient déjà abordés dans ses propres films. Adriana qui a tourné déjà quelques scènes a une vraie folie dans la comédie, et Addy a aussi une touche très personnelle. Chacun s’est vraiment approprié ses histoires, cela enrichit considérablement la série. 

Rendez-vous dans quelques jours plus longuement avec Julien Vargas, Fred de Loof et Pierre Nisse, pour en savoir encore plus sur cette série qui s’annonce aussi tendre que déjantée, et que l’on attend sur les écrans en 2021.

Crédit photos plateau: @RTBF

 

 

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