La belle histoire de Cannes 2012?
Amélie, bille en tête

Elle s’appelle Amélie et elle est namuroise. A tout juste 25 ans, elle a signé un tour de force étonnant : réaliser un long métrage (presque) toute seule, dans son coin. Une aventure qui semble impossible, et pourtant, elle en est venue à bout. L’histoire aurait pu s’arrêter là. La Tête la Première aurait peut-être fini par convaincre un distributeur, serait sorti à la sauvette dans quelques salles…. Mais le culot paie parfois au-delà de toute espérance et Amélie van Elmbt voit aujourd’hui son destin épouser une courbe insensée. Sa bonne fée a pour nom ACID, une section découverte qui lui permettra de passer quelques jours du mois de mai au Festival de Cannes. Et pas en tant que touriste…

 

Formée à l’IAD, fan, puis collaboratrice de Jacques Doillon, Amélie van Elmbt veut faire du cinéma. Pour elle, c’est clair. Elle a étudié pour cela. Elle croit en elle et aux histoires qui l’habitent. Mais, en général, réaliser un film implique la mise en place d’une logistique sophistiquée et la collecte de moyens financiers importants.

Hélas pour elle, malgré l’indiscutable bouillonnement qu’on observe en Belgique et tout particulièrement dans la partie francophone du pays, les producteurs qu’elles rencontrent ne se montrent pas intéressés. Ce n’est pas anormal ni révoltant : il se tourne une douzaine de longs métrages majoritaires chez nous chaque année. Il y a donc beaucoup de candidats et peu d’élus. Et nous ne sommes pas les plus élitistes. En Flandre, territoire plus vaste, doté d’un public conséquent qui suit de très près les films du terroir, le nombre de productions destinées au cinéma ne dépasse pas dix sur une année. Et les réalisateurs qui sont aux commandes sont souvent des artistes confirmés ou qui ont fait leurs armes sur des séries télé.

Mais Amélie n’est pas du genre à baisser les bras pour si peu. Elle prend le parti de travailler « à l’arrache ». Avec l’argent que sa maman lui a laissé, elle conçoit un plan de bataille serré. Elle réunit des techniciens qui viennent de terminer des écoles de cinéma, et choisit de tourner avec deux caméras pour produire le plus de matière possible sur une durée réduite. Trois semaines de tournage pour un long métrage, c’est très peu, mais son sens de la débrouille et son culot laissent pantois.

 

 

Très vite, elle convainc le formidable David Murgia de la rejoindre devant la caméra pour l’aider à  mener sa tâche titanesque. Le jeune acteur qui monte, omniprésent sur les planches dans des productions qui ne recueillent que des louanges a été nommé aux Magritte pour sa prestation dans Rundskop. C’est un battant. Il  relève le gant. Il jouera donc dans le film avec Alice de Lencquesaing, une des révélations 2010 du cinéma français. On l’a notamment vue dans L’Heure d’été et Le Père de mes enfants. Coup de chance, ces deux-là étaient libres ensemble pendant le mois d’août 2011.

Alice, c’est Zoé qui décide de prendre la route pour approcher un écrivain qu’elle adore et peut-être trouver un sens à son existence. Sur son chemin, elle croise Adrien, un jeune comédien qui, curieux et intrigué par son caractère insaisissable, a envie de la suivre…

Jusqu’à Cannes?

 

 

Sur la Croisette, il n’y a pas que la Sélection Officielle. Il y a aussi la Semaine de la Critique et la Quinzaine des réalisateurs. Oui, mais pas seulement. Autour de ces grands labels qui attirent particulièrement les caméras gravitent une myriade d’autres sections. Parmi celles-ci (que nous vous détaillerons sous peu), on trouve l’ACID. Ou plutôt la vitrine cannoise de l’ACID, association de cinéastes qui aide à la diffusion en salles de films indépendants et favorise la rencontre entre ces films, leurs auteurs et le public.

La force de l’ACID repose sur son idée originale : des cinéastes soutiennent les films d’autres cinéastes, quelle que soit leur nationalité. Chaque année, les artistes de l’ACID accompagnent une trentaine de longs métrages, fictions et documentaires, dans plus de 150 salles indépendantes et dans les festivals en France et à l’étranger. Parallèlement à la promotion des œuvres auprès des programmateurs, au tirage de copies supplémentaires et à l’édition de documents d’accompagnement, l’ACID renforce la visibilité de ces films par l’organisation de nombreux événements. Une belle démarche positive, altruiste et volontariste.

 

 

Afin d’offrir une tribune aux jeunes talents, l’ACID est donc également présente depuis seize ans au Festival de Cannes avec une programmation parallèle de 9 films. La plupart n’ont pas de distributeur. Depuis sa création, l’ACID a donc promu plus de 500 films.

Yolande Moreau ou Lucas Belvaux figurent, par exemple dans la liste prestigieuse de réalisateurs(trices) qui furent sélectionnés à leurs débuts dans cette session cannoise. L’an dernier, c’est Le Grand Tour qui y fit sensation.

 

En 2012, sur près de 300 films, La Tête la Première attire l’attention des sélectionneurs qui retiennent le long métrage d’Amélie dans une sélection pourtant étroite de neuf longs métrages. Il s’agit pour la jeune réalisatrice, une battante douée en outre d’un excellent sens de la communication, d’une incroyable opportunité. En plus de booster la carrière de sa première réalisation, cette sélection devrait en toute logique lui permettre de tourner à l’avenir dans un contexte plus confortable.

 

En attendant, devant cette détermination qui a fait exploser tous les obstacles, nous, nous sommes béats d’admiration.

 

 

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