Ce 13 novembre sort Mea Culpa, documentaire de Patrick Tass qui entre en pleine résonance avec l’actualité et les tensions qui déchirent aujourd’hui le Liban et la Palestine.
Ca commence par une sonnerie, un message déposé sur un téléphone. Patrick reçoit un vocal de sa mère Randa. Elle s’y désole de la distance qui les sépare, de son silence, de la vie qui passe et du temps qui s’écoule. Patrick vit à Bruxelles, Randa vit au Liban. Il est le fils, elle est la mère, et à défaut de partager leur quotidien, ils partagent mensonges et culpabilité.
Patrick vit sa vie d’homme amoureux à Bruxelles, et au fil des mois, on le voit sortir, s’amuser, et s’installer avec son compagnon. Mais pour sa mère, ce compagnon est un colocataire, « l’autre mec » qui vit avec lui. Alors qu’elle s’inquiète de le savoir seul en pleine épidémie de Covid, enfermé chez lui par la quarantaine, il garde le silence sur leur relation. Ce mensonge répond à un autre mensonge, fondateur. Enfant, Patrick a toujours pensé qu’il était Libanais. C’est par hasard qu’il découvre un jour sur ses papiers d’identité qu’il est palestinien, et même, réfugié. Il peine à se réconcilier avec ce statut d’apatride qu’on lui a caché.
Ces mensonges fondamentaux qui empêchent de savoir qui l’on est font que Patrick a la sensation de s’être toujours construit dans la négation, l’opposition, en définissant ce qu’il n’était pas avant de pouvoir dire qui il était. Et paradoxalement, c’est la volonté de sa mère de le voir s’élever socialement, les études qu’elle lui a offertes et les livres qu’elle lui a donnés qui ont fini par l’éloigner d’elle.
Film patchwork, Mea Culpa est fait des bribes de leurs conversations, à distance le plus souvent, IRL exceptionnellement, quand Patrick retourne au Liban. Quelques images volées à leur quotidien sont projetées de temps à autre, comme pour faire la jonction entre les différentes pièces du puzzle, ces messages et discussions qui en disent beaucoup sans jamais dire l’essentiel, peut-être. L’histoire singulière de Patrick et Randa (ainsi que de son père et sa soeur) s’inscrit dans une réflexion plus large sur l’exil, le déclassement et les transfuges de classe, le patriarcat, le racisme et les rapports de domination, et surtout, alors que les mois passent, dans le présent qui semble se répéter d’un pays et d’un peuple martyrisés. Un film urgent donc, où l’intime, plus que jamais, est politique.
Le film sera montré en avant-première ce mercredi 13 novembre au cinéma Galeries dans le cadre de la soirée No pride in Genocide, en collaboration avec United Screens for Palestine et Pink Screens.