« Vitrival », enquête en cours

Avec leur premier long métrage de fiction, Vitrival, Noëlle Bastin et Baptiste Bogaert usent habilement du format de l’enquête policière pour dresser le portrait collectif d’un village wallon, au fil des saisons

Découverts avec une poignée de courts métrages, Noëlle Bastin et Baptiste Bogaert présentent en Compétition Nationale au Brussels International Film Festival leur premier long de fiction, Vitrival. La filmographie de duo chemine entre fiction, documentaire, et arts plastiques, une approche hybride du média cinématographique, qui affleure dans Vitrival, même si le film affiche à première vue un format « traditionnel »: la chronique au fil des saisons d’un petit village rural, ou encore, une sorte de relecture savamment revisitée des Experts – en Wallonie, donc.

Le film débute avec Benjamin (Benjamin Lambillotte) et Petit Pierre (Pierre Bastin), policiers municipaux de Vitrival. Après s’être assurés que l’arrivée à l’école se déroule sans heurts, ils roulent à toute allure sur les routes communales pour filer vers leur nouvelle mission, alors que l’animateur de la radio local précise les préoccupations des habitants du coin: quel temps fera-t-il aujourd’hui? Bienvenue à Vitrival, paisible bourgade dont le quotidien se trouve bouleversé par des tags injurieux qui prolifèrent sur les murs du village, jusqu’à ceux, ô sacrilège, de l’église. Mais qui peut bien semer le doute dans l’esprit des villageois avec ces graffitis de pénis, alors même que la communauté s’apprête à enterrer Christian, qui vient de s’ôter la vie? Voilà une enquête pour nos deux policiers. Alors certes, c’est pas les Experts Manhattan comme ils le disent eux-mêmes, mais au fil des mois, ils s’emploient à lutter contre ce qui va devenir une double épidémie, de bites et de suicides.

Au fil d’une année où s’égrènent les décès et les actes de vandalisme, tout le village se mobilise pour tenter de comprendre, des piliers de bar au club des retraités qui arpentent les rues à la recherche d’indices, en passant par le voisin, qui observe de sa terrasse les allées et venues de tout un chacun, notant dans un petit carnet l’état psychologique de ses concitoyens. Vitrival, s’ił suit à la tracę les investigations de son duo d’enquêteur, est aussi et peut-être avant tout la peinture humaniste d’une communauté unie par sa situation socio-géographique, loin des grands centres urbains, et nécessairement définie par la collectivité. Ce n’est pas un hasard si les problèmes de voisinage ici sont des affaires états, c’est que le vivre ensemble, avec bienveillance quand c’est possible, coule de source. Tout le monde se connait, et surtout tout le monde est relié – souvent par des liens familiaux.

Vitrival est une sorte d’anti-thriller, où le rythme de la vie au village, au fil des saisons, s’impose à l’enquête en cours. Un polar ralenti, en quelque sorte, qui prend le temps d’observer le quotidien des gens, notamment d’une jeunesse qui rêve loin de la ville, avec les difficultés que cela implique (par exemple pour la cousine du héros, empêchée du fait de son genre d’intégrer la fanfare locale comme tambour), mais aussi les possibles. Avec un humour à plat, résolument premier degré, empreint de tendresse et dicté par ses personnages, incarnés par les villageois, Vitrival dresse le drôle de portrait d’une communauté complexe et attachante.

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