Largo Winch: le cinéma belge passe à l’action

Olivier Masset-Depasse relève haut la main l’ambitieux défi accepté en réalisant Largo Winch: Le Prix de l’Argent, troisième opus des aventures du célèbre milliardaire imaginé par Jean van Hamme à la fin des années 70, méga star de la bande dessinée, et déjà héros de deux films sortis en 2008 et 2011. 

Il en fallait de l’audace pour s’attaquer à Largo Winch, héros culte des aficionados du 9e art made in Belgium, symbole du cool 90s, et déjà adapté au cinéma à la fin des années 2000 avec succès. D’autant plus que la désormais franchise cinématographique revient près de 15 ans après le premier volet, dans un monde qui a sérieusement changé – ses héros aussi. Comment un personnage comme Largo Winch, milliardaire aussi désinvolte que philanthrope a-t-il bien pu vieillir? Et quelle part de responsabilités est-il prêt à prendre? Deux questions que se pose Olivier Masset-Depasse dans Le Prix de l’argent, entre deux scènes d’action pétaradantes.

Les premières images nous montrent un Largo Winch certes torse nu (on ne change pas des pectoraux qui gagnent, ceux de Tomer Sisley, hyper affuté), mais en pleine opération transmission. Au coeur de la jungle thaï, il enseigne à son fils de 15 ans, Noom, les rudiments de la mécanique. Mais ce jeune fils, orphelin de mère, a lui aussi des choses à apprendre à son père, et notamment, à se poser des questions sur les paradoxes de son engagement, et à mesurer les responsabilités de sa génération dans la destruction de la planète. Mais leur discussion à coeur ouvert est brutalement interrompue par le kidnapping de Noom par des brigands que Largo poursuit valeureusement mais sans succès dans la jungle thaïlandaise. Cette première course-poursuite ébouriffante donne le ton d’un film résolument d’action mené à 100 à l’heure, qui convoque les marqueurs reconnaissables du genre et de la franchise (les requins de la finance, les coups montés et autres traîtres, les décors exotiques, les combats haletants, les méchants tourmentés).

Là où le film réjouit, c’est dans la créativité des scènes d’action, au nombre compté, mais qui s’inscrivent dans la durée, et ont chacune une identité propre, développant des tonalités différentes en fonction des protagonistes qu’elles mettent en scène.

Là où il surprend, c’est dans la caractérisation des personnages, révélant des failles plus profondes qu’escomptées chez Largo, et une backstory soignée chez Esio, le « grand méchant », incarné par James Franco, carrément. Et puis avec l’irruption aussi d’un troisième larron de choix, ou plutôt une larronnesse, Bonnie (Elise Tilloloy, une révélation), jeune post-adolescente geek et militante, qui va venir secouer Largo, comme un écho aux interrogations posées par son fils.

Sa présence amène également dans ce troisième volet pourtant très sombre (plus qu’un héros, Largo est désormais un anti-héros, tourmenté par ses fêlures et ses erreurs) une touche de malice bienvenue, en mode buddy movie réinventé. C’est duo de cinéma assez inédit (un homme d’âge mûr, une jeune femme insolente, sans que plane le spectre d’une relation romantique), qui vient compléter d’autres associations/ oppositions entre Largo et Esio, son meilleur ennemi, ou encore Largo et Chloé (Clothilde Hesme), sa collègue dévouée.

Ajoutez à tout ça le plaisir (voire la fierté) de savoir des équipes belges aux manettes de ce film d’action, genre encore non exploré en nos contrées, et la curiosité de deviner quelles scènes ont été tournées en Belgique (on attend vos commentaires!), et vous obtenez un film d’action grand public malin et hyper divertissant, parfaitement de saison.

 

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