Les Rayures du Zèbre : le Mariage de l’ironie et de l’émotion

Enfin ! Le nouveau long métrage de Benoit Mariage, le quatrième du réalisateur namurois, le troisième avec Benoit Poelvoorde sort en salle ce 5 février.

A vrai dire, nous avons déjà eu la chance de le voir deux fois: la première en vision de presse, la deuxième lors d’une avant-première assez spectaculaire la semaine dernière à Charleroi. Les deux fois avec un grand plaisir : celui de la découverte, puis celui de la confirmation et de l’observation plus attentive des détails.

Et bonne nouvelle, cette deuxième confrontation avec le film n’a pas érodé d’un millimètre notre enthousiasme initial.

Dans la foulée de ces projections, passons au scanner quelques idées qui pourraient trotter dans vos têtes et confrontons-les à la nature profonde de ce quatrième long métrage de Benoit Mariage. Car Les Rayures du Zèbre, est un film très différent de ce que laissent augurer la bande-annonce et l’affiche.

Très différent… et beaucoup plus séduisant.

 

 

 [Photo :  © François Musy ]

 

Les Rayures du Zèbre porte la marque ‘Benoit Mariage’.

VRAI ! C’est un pur film de Benoit Mariage qui condense tout ce qui fait le charme du réalisateur et renoue avec sa meilleure veine : le ton y est doux et amer, on oscille sans cesse entre les sourires et l’émotion, la thématique de la paternité est omniprésente, les personnages sont savoureux qu’ils soient souvent à l’écran ou simplement de passage.

Sur l’échelle du petit Mariage illustré, Les Rayures nous semble bien plus cohérent que Cow-Boy où le pathétique et le rire se mélangeaient avec moins d’harmonie et plus accessible (et donc commercial) que l’excellent Les Convoyeurs attendent dont il se rapproche néanmoins sur de nombreux points.

 

 

Les Rayures du Zèbre est une comédie loufoque

FAUX ! ARCHI-FAUX  ! La bande-annonce tente de nous en persuader et pourtant, si on sourit à quelques truculences de Benoit Poelvoorde ou devant la bonhomie naïve de Tom Audenaert, le film n’est pas construit pour nous faire rire. Si vous voulez vous tordre les côtes, allez voir 9 mois ferme ou 16 ans ou presque.

Ici, le registre est plus doux, plus profond. Jamais la mécanique des scènes n’est destinée exclusivement à nous dérider les zygomatiques, la tonalité générale évoque (nous l’avons dit plus haut) le meilleur de Mariage, mais aussi (sans surprise) le cinéma de Bouli Lanners.  Le fond est très proche de Yam Dam de Vivian Gofette qui a reçu le prix Cinevox au dernier FIFF namurois.

 

 

Benoit Poelvoorde surjoue

FAUX ! Encore une fois, la bande-annonce peut faire penser que Benoit, avec son bedon, son anneau à l’oreille et son accent bruxellois est une atroce caricature de Brusseleer speedé. Il n’en est rien. Le personnage est truculent comme pouvait l’être Raymond Goethals, mais il est surtout sensible. Il est gouailleur, mais il est émouvant.

Avec une précision chirurgicale, l’acteur alterne les registres, les superpose dans une même scène, renoue avec la tension silencieuse qui lui vaut une nomination aux Magritte pour Une Place sur la Terre. Il ne se déchaîne que quand et uniquement quand son rôle l’exige.

Comme l’écrivait récemment Telerama, Benoit Poelvoorde est parfois un acteur difficile à contrôler sur un plateau, mais c’est avant tout un très grand comédien qui a encore beaucoup à offrir. Il le prouve ici. Sur l’écran, il est exceptionnel.

 

 

Les Rayures du Zèbre n’est qu’un show Poelvoorde

FAUX ! Certes, le comédien est omniprésent, mais les acteurs qui l’entourent sont d’une justesse confondante, agissant comme des contrepoints qui font constamment basculer le jeu de Benoit.

Pour son premier grand rôle, Marc Zinga compose un personnage plutôt taciturne, en tous cas déterminé et Tom Audenaert (Hasta La Vista) est le bon naïf de service, celui qui se laisse aveugler par le charme sulfureux de l’Afrique (et des Africaines) au point d’oublier tout le reste. Tous deux emportent l’adhésion.

De l’agent slave véreux (Bess Limani) au président déchaîné en passant par les gazelles africaines, tous les seconds rôles tirent leur épingle du jeu face à ce brelan d’as. C’était une gageure. Mission accomplie.

 

 

Les Rayures du Zèbre est un film sur le foot.

VRAI ! Avec son feeling de journaliste et un guide hors normes (Serge Trimpont, ex-journaliste lui aussi, aujourd’hui agent de joueur), Benoit Mariage parle ici du football bien mieux que quiconque l’avait avant lui au cinéma. Un signe qui ne trompe pas? Alors que tous les autres réalisateurs se cassent systématiquement les dents sur la manière de montrer le foot sur grand écran (3-0, Didier…), Benoit bluffe tout son monde avec une courte séquence tournée à Charleroi lors du match Sporting-Zulte, visiblement. Le footballeur campé par Marc Zinga est parfaitement intégré à l’action, on y est, on y croit.

Du président de club truculent (Renaud Rutten à nouveau parfait), aux administrateurs qui traînent en coulisses (parmi lesquels on retrouve deux comédiens vus dans Cow-Boy : Jean-Marie Barbier et Eric Larcin), Benoit Mariage évolue à la limite du hors-jeu mais ne tombe jamais dans l’invraisemblance.

Efficacité maximale, donc !

 

 

Les Rayures du Zèbre n’est qu’un film sur le foot

FAUX ! Le football est loin d’être le seul axe exploité dans le film. Comme dans tous les films de Benoit Mariage on plonge ici au cœur des relations humaines avec des thématiques récurrentes.

Le thème de la paternité est ici omniprésent, les jeux de l’amour et de la séduction sont également très bien traités.

Mais le scénariste-réalisateur se renouvelle aussi avec une formidable observation des subtilités qui régissent les rapports entre Africains et Européens. Paternalisme d’un côté, roublardise de l’autre, rêves et fantasmes qui se croisent : la palette est complète et sans lourdeur, le scénariste-réalisateur en démont(r)e la mécanique tout en soulignant qu’une relation saine et franche est néanmoins possible.

 

  [Photo :  © François Musy ]

 

Les Rayures du Zèbre peut être un gros succès public

VRAI ! Avec un film aussi bien écrit, ciselé, rythmé, sans temps mort, ni chute d’intérêt (super travail de Philippe Bourgueil à nouveau), avec un casting épatant et un thème porteur (paradoxalement peu exploité au cinéma), Les Rayures du Zèbre a tous les atouts pour devenir le succès belge de ce début d’année.

En dessous de 30.000 spectateurs, ce serait une franche déception. 60/70.000 est envisageable. Et plus si affinités.

Là, c’est à vous de jouer…

 

 

 

Produit par Boris Van Gils et Michael Goldberg (Viva Riva, le monde nous appartient), le film sera distribué dans les salles à partir du 5 février par Bardafeu.

Le concours pour gagner des invitations pour l’avant-première exceptionnelle du 30 janvier est ICI

 

 

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